jeudi 5 avril 2012

Mali : La CEDEAO sur le pied de guerre à Abidjan


06-04-2012
01:53
Mali : La CEDEAO sur le pied de guerre à Abidjan
Sitôt dit, sitôt fait. A l’issue du sommet extraordinaire qui réunissait les chefs d’Etat de la CEDEAO, lundi, dans la capitale sénégalaise, le président en exercice de ladite institution, l’Ivoirien Alassane Ouattara annonçait la mise en place immédiate d’une force d’attente ; dans la foulée, il indiquait que les chefs d’état-major des pays concernés devaient se réunir dans un bref délai dans le but d’examiner « les modalités d’activation » de ladite force.

C’est désormais chose faite : jeudi 5 avril 2012, se tint à Abidjan ladite rencontre « d’urgence », à laquelle prirent part les chefs d’état-major de la Côte d’Ivoire, du Nigeria et du Niger ; fait digne d’importance, en présence d’officiers américains et français.

On le voit, la Cédéao est, au plus bas mot, sur le pied de guerre. Secret militaire oblige, la rencontre d’Abidjan s’est faite à huis clos ; mais la célérité avec laquelle l’entité ouest- africaine entend gérer l’affaire malienne montre bien que la double crise au pays d’ATT la préoccupe au plus haut point ; ce qui ne signifie pas que l’entreprise ne présente pas de difficulté.

Car on se rappelle qu’à l’occasion de la crise ivoirienne, il y a moins d’une année, la CEDEAOpatina, tituba, et fit étalage de toutes ses failles et fissures. Pour l’heure, on a l’impression que tout le monde y chante à l’unisson : les rebelles touaregs, qui ont déferlé et conquis la majeure partie du territoire malien, autant que les putschistes, qui ont conquis un pouvoir qu’ils ont toutes les peines du monde à gérer, semblent avoir fait l’unanimité des Etats membres contre eux ; soit ; il reste à savoir qui, concrètement, enverra quoi pour renvoyer Sanogo et consorts à leur caserne et en même temps refouler les combattants du MNLA et affidés dans leurs dunes désertiques.

Car le succès d’une mission armée de la CEDEAO suppose un coup double : restaurer l’ordre constitutionnel, d’une part, et, d’autre part, étouffer les velléités sécessionnistes des hommes bleus qui, d’ailleurs, ont trouvé des alliés de circonstances en Ansar Dine et Aqmi, tous formant une sainte alliance aux motivations diverses : les uns étant pour la partition du territoire malien, les autres pour sa conversion en Etat islamique ; la nébuleuse filleule d’Al Qaïda, elle, ne veut ni plus ni moins qu’une zone « sécurisée » dans laquelle elle opère en toute tranquillité.

La CEDEAO a du pain sur la planche ; car Sanogo et ses hommes, même affaiblis par les différents embargos, montrent qu’ils entendent rester à la barre ; quant au conglomérat réunissant MNLA, Ansar Dine et Aqmi, on peut le dire, sans risque de se tromper de beaucoup, ils n’entendent pas se faire déloger de leurs positions, qu’ils estiment avoir chèrement acquises.

Pareille expédition punitive peut s’avérer coûteuse en hommes, en finance ainsi qu’en logistique ; nul doute que les alliés occidentaux qui semblent avoir donné leur quitus pour la mener sauront en temps opportun délier les cordons de la bourse ; c’est en tout cas ce que souhaitent les pays membres de la CEDEAO, qui tiennent là une bonne occasion de résoudre à l’africaine un problème ouest-africain.

Par Jean Claude Kongo

L’Observateur Paalga



Mali : La France assise « entre deux chaises »

On l’avait connue plus engagée, surtout ces dernières années ! L’Afghanistan, la Libye, laCôte d’Ivoire… Récemment, la France n’avait reculé devant rien –si ce n’est le cas de laSyrie, sans jamais prêter attention à l’ingérence dont elle se rendait alors coupable. Sans jamais non plus envisager quelconques conséquences de ses actes et interventions.

Mais, alors que, depuis plus de deux mois, la situation nord-malienne ramène le pays aux sombres heures de son histoire, la France affirme inlassablement qu’elle ne « s’engagera pas militairement » dans la résolution de la crise. Tout au plus multiplie-t-elle les déclarations, et tente-t-elle d’user de son pouvoir diplomatique. Quelle « étrangeté » de voir aujourd’hui celle qui s’affichait l’an dernier en sauveuse, rester aujourd’hui « dans ses petits souliers ? ».

Quelle surprise, de l’entendre déclarer que seule la CEDEAO peut-être habilitée à s’impliquer dans la résolution du conflit ? Après le désastre libyen, la France aurait-elle enfin appris de ses erreurs ? Serait-elle finalement disposée à reconnaître le potentiel pouvoir décisionnel des institutions sous-régionales ? Le visage de la France serait-il en train de changer ? Sans doute s’emploie-t-elle plutôt, dans l’état actuel des choses, à faire le dos rond.

Timidité, diplomatie, et renouveau d’enjeux

Le coût d’une intervention militaire française, même sous un mandat de l’OTAN, ne saurait en effet être assumé par une France en crise, cherchant à freiner ses dépenses. On voit d’ailleurs mal comment Nicolas Sarkozy, président candidat à sa propre succession, pourrait justifier une telle intervention auprès de l’opinion française. Tant au niveau budgétaire qu’éthique. Mieux vaut sans doute s’abstenir pour le moment, plutôt que de risquer, à moins de trois semaines du premier tour de l’échéance, de lancer une nouvelle polémique.

Néanmoins, les choses s’accélèrent peu à peu. Des insipides déclarations, aux « yeux doux » faits au président du Faso par l’intermédiaire d’Alain Juppé, il y a plus d’un mois, la Franceentend aujourd’hui mobiliser la communauté internationale pour une rapide résolution de la crise. C’est que cette dernière a pris une autre tournure.

Le danger islamiste guette. Tombouctou, tombée aux mains d’Ansar Dine, d’AQMI et duMNLA, vivrait depuis l’heure sous l’application de la « loi de la charia ». La lutte armée se transforme, et les revendications ne sont plus les mêmes. Il ne s’agit plus uniquement de rebelles Touaregs combattant pour l’indépendance du Nord du pays. Le chef du mouvementAnsar Dine, lui, se bat pour l’application de la charia dans tout le Mali. Nul ne doute que ce dernier ne s’arrêtera pas à Tombouctou. C’est Bamako qui est visé.

C’est ainsi que, assise entre deux chaises, la France avance « sur la pointe des pieds ». Sa volonté d’agir contre les mouvements islamistes ne fait aucun doute. C’est pourquoi elle somme aujourd’hui le Conseil de sécurité de l’ONU, et également la CEDEAO, de se mobiliser contre les risques en présence au Mali. Mais, redoutant sans doute le sort des 6 otages français encore détenus par AQMI, elle exclue inlassablement toute possibilité d’engagement militaire. Non, la France n’a pas changé. Ses intérêts toujours « en ligne de mire », elle va simplement tenter, cette fois-ci, d’user davantage de diplomatie.

Cerise ASSADI-ROCHET/stagiaire

L’Express du Faso




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